Le tabac fait débat.
En marge de notre Val de Nauze. |
Le paradoxe de la tabaculture.
"Avec le tabac et l'alcool l'administration est la plus grande blanchisseuse d'argent sale de notre époque". Philippe Bouvard.
À l'occasion de sa découverte du canton de Villefranche-du-Périgord Dominique Christian, sous-préfète de l'arrondissement de Sarlat, le mardi 29 novembre dernier, a visité le siège d'une exploitation tabacole à Besse. En l'occurrence, c'est Alain Lacotte qui l'a reçue sur son site. Il cultive deux hectares de Burley ITB 501 et il a exposé à la mandataire du gouvernement les inquiétudes de la profession.
Dominique Christian écoute le plaidoyer d'un tabaculteur interpellé par la remise en cause d'une culture presque ancestrale. Photo Daniel Conchou.
L'avenir de la tabaculture fait débat. N'oublions pas que le tabac est, de nos jours, un des plus grands fléaux de société. Le tabac, hélas, quelles que soient les circonvolutions employées pour le qualifier, est une drogue. Il hypothèque la santé de la population avec une dérive plus qu'inquiétante chez les très jeunes adolescentes, les futures mères, qui bien souvent, trop souvent, sont dépendantes… pour ne pas employer d'autre terme. Par ailleurs la tabagie entraîne une pollution des lieux publics, abandon des mégots un peu partout, les reliefs de cigarettes abandonnés polluent les rivières et les plages, souvent ils sont à l'origine d'incendies ; notons qu'un important château privé,* un des fleurons du Périgord, brûla, en 1968, dit-on lors de sa visite, à cause de jeunes fumeuses qui ont négligé sa dangerosité. La restauration de ce patrimoine fut supportée par… les contribuables.
Le tabac propulse des recettes fiscales considérables. Même si l'on néglige l'effet pervers et immoral d'un état qui, par le biais de taxes, entretient des rentrées importantes, on ne peut qu'être dubitatif sur les ravages financiers que cette pompe aspirante refoulante génère. Le coût financier des maladies provoquées par la tabagie, sans parler de la détresse qu'elles provoquent, s'avère bien supérieur aux maigres apports fiscaux générés.
Il aura fallu attendre 1991 pour qu'un ministre, Claude Évin, s'émeuve de ce fléau. Il met en place les premières actions de lutte contre le tabagisme et la publicité sur l'alcool, à travers sa loi qui interdit l'affichage de publicité pour l'alcool et le tabac en 1991. La vente de ces produits devint, théoriquement, interdite pour les moins de 16 ans ainsi que le fait de fumer dans la plupart des lieux publics. Les sceptiques peuvent dire ce qu'ils veulent ; c'est une première victoire des non fumeurs. On ne fume plus et c'est, à peu près, bien respecté dans lieux publics et dans les transports en commun… sans que personne ne se trouve mal et c'est tout de même plus agréable pour celles et ceux qui passifs, avant, subissaient les préjudices du tabac sans être fumeurs. Il reste néanmoins un chemin considérable à parcourir pour se dégager de cette drogue bien nocive.
Le tabac fait partie de la culture locale. Dans la France rurale "on" était plutôt fiers de l'industrie du tabac et dans le monde agricole "on" trouvait intéressant de jouir du système même s'il était contraignant en labeur, en amplitude calendaire et avec ses rigueurs "administratives" quantités, dates… Les exploitants réservaient au tabac leurs meilleures parcelles et les amendements les plus riches. Les cités tabacoles Sarlat, Bergerac, St Cyprien étaient considérées, par leurs concurrentes, avec envie. Les "riches" planteurs de la vallée étaient pratiquement jalousés à cause de la manne "bienfaitrice" qui les dotait. On mesurait avec admiration les fermes à la dimension de leurs séchoirs à tabac.
Les derniers tabaculteurs, eux, réagissent. Ils voient leurs exploitations menacées ; les manœuvres d'incitation à la récession tabacole aidant, sur le canton de Villefranche, il ne reste plus que douze planteurs. Si les contraintes sont moins fortes qu'autrefois grâce à la mécanisation, les tabaculteurs, comme beaucoup d'autres filières agricoles, souffrent d'un manque de main d'oeuvre. Le suivi de cette culture révèle son exigence en eau et en chaleur. L'inquiétude des planteurs de tabac est grande quant à l'avenir de cette culture avec la remise en cause des aides européennes provoquant une diminution du nombre de producteurs. À défaut de nouveaux planteurs, il faut essayer de favoriser une activité chez les producteurs actuels. L'abandon de l'activité tabacole, ruinerait inévitablement beaucoup d'exploitations. Elle s'éteint lentement. En 1988, 26 techniciens travaillaient pour la Coopérative des producteurs de tabac Périgord Tabac; aujourd'hui, ils ne sont plus que 3 !
La ruralité du Périgord noir a connu, il y a plus d'un siècle, la ruine de son vignoble florissant à cause du phylloxéra. Cette catastrophe a amplifié l'exode rural. Quelle culture de substitution pourrait prendre rang, dans un contexte concurrentiel international en estimant les coûts hexagonaux sans commune mesure avec ceux de nos voisins ?
Le dilemme. Faut-il, au nom de la santé publique, prendre une décision tranchée, inadmissible pour les uns, salutaire pour les autres, d'interdire le tabac ? Dans la même logique on pourrait interdire les motocyclettes, surtout celles des grosses cylindrées, à cause de leur dangerosité, le négoce des fusils, sans même avoir à disserter sur l'inhumanité d'une "barbarie archaïque", en retenant le seul côté des accidents de chasse, etc.
Le rôle des décideurs, législateurs et des gouvernants est de chercher le compromis qui passe pour être acceptable pour tous ; autant dire démontrer la quadrature du cercle.
Pierre Fabre.
* En 1929, le Baron de Bastard acquit tout le domaine [Hautefort] et décida de le sauver. A sa mort, en 1957, sa veuve continua la restauration et vint habiter dans une aile du château en 1965.
Un incendie, dû à l’imprudence de deux adolescentes qui fumaient en cachette dans les combles, ravagea le château en 1968.
La baronne eut l’énergie et le mérite de décider sa reconstruction intégrale.
Elle fut aidée par le maire, le Département, le Service des Beaux-Arts et le Ministère des Affaires Culturelles.
Source "Histoire du château d'Hautefort". Professeur Emérite Pierre AUMONIER.
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